L’étalonnage numérique est une étape cruciale dans la production vidéo. Il permet de transformer une image brute en une esthétique visuelle finale cohérente et plaisante, adaptée aux besoins narratifs. Cette étape de la postproduction est devenue incontournable avec l’évolution des caméras numériques. Mais pour exploiter tout son potentiel, le choix du profil d’image lors de la capture vidéo est déterminant. Dans cette article, je vous plonge dans le monde fascinant de l’étalonnage numérique qui a remplacé celui très laborieux de l’argentique. Je vous explique, également, les caractéristiques à prendre en compte pour un enregistrement optimal de vos prises de vue pour la retravailler en postproduction grâce aux outils disponibles sur les logiciels de montage.
Qu’est-ce que l’étalonnage numérique ?
L’étalonnage numérique, aussi appelé color grading, consiste à manipuler les couleurs, la luminance et le contraste d’une image afin d’établir une ambiance ou un style spécifique. À la différence de la correction colorimétrique, qui vise simplement à rectifier les problèmes techniques (balances des blancs incorrectes, sous-exposition, etc.), l’étalonnage ajoute une dimension artistique et narrative au contenu. Il s’opère à la fin du montage quand toutes les prises de vue ont été placées et calées sur la time line.
Avant l’étalonnage numérique au cinéma
Les Procédés Traditionnels
Au début du cinéma, les films étaient tournés en noir et blanc. Lorsque la couleur a été introduite avec le Technicolor dans les années 1930, les processus de correction des couleurs ont commencé à évoluer. Le Technicolor utilisait trois couches de film pour capturer les couleurs, et l’étalonnage se faisait par séparations de ces couches pour ajuster la couleur finale. Chaque correction nécessitait une approche artisanale. Cela impliquait des manipulations chimiques complexes et beaucoup de patience.
L’Évolution vers le Numérique
Avec l’arrivée du numérique dans les années 1990, le processus d’étalonnage a radicalement changé. Les logiciels ont commencé à remplacer les méthodes analogiques, facilitant l’accès à des outils pour coloriser et retoucher les images de manière plus efficace. Des noms emblématiques comme Avid et Apple Final Cut Pro sont apparus, mais c’est DaVinci Resolve qui s’est imposé comme un choix de prédilection pour les professionnels grâce à ses fonctionnalités avancées. Le passage au numérique a non seulement simplifié le processus d’étalonnage, mais a également ouvert la voie à de nouvelles techniques d’étalonnage. Les effets spéciaux, la correction de la lumière et des ombres, et l’application de LUTs (Look-Up Tables) sont devenus courants. Au fil du temps, l’étalonnage est devenue une étape essentielles dans la création audiovisuelle.
Pourquoi l’étalonnage est-il important ?
L’étalonnage n’est pas simplement une question technique ; c’est un art qui peut transformer une narration visuelle. Les couleurs peuvent évoquer des émotions, établir des ambiances et guider l’attention du spectateur.
Elles ont un impact profond sur les émotions humaines. Par exemple, des teintes chaudes comme le rouge et l’orange peuvent stimuler des sensations de passion ou d’urgence, tandis que des tons froids comme le bleu peuvent évoquer la tranquillité ou la mélancolie. L’étalonnage permet donc de manipuler ces émotions pour mieux raconter une histoire. Il influence l’impact narratif. Dans le cas d’un thriller, par exemple, des ombres marquées et des couleurs désaturées créeront une tension dramatique.
De nombreux films et séries se distinguent par leur palette de couleurs unique. L’étalonnage peut aider à créer une identité visuelle qui rend un projet reconnaissable.
Dans un long métrage ou une série, maintenir une continuité visuelle est vital. L’étalonnage permet de s’assurer que toutes les scènes se fondent harmonieusement, peu importe où et comment elles ont été tournées.
De plus, dans un secteur où la qualité visuelle devient un critère majeur, un étalonnage bien réalisé permet de se distinguer. Que ce soit pour un film, une publicité ou une vidéo de contenu en ligne, il contribue à projeter une image professionnelle auprès de clients et du public.


Les bases de travail
Comme tout travail, l’étalonnage demande plusieurs étapes pour arriver au produit fini ( du moins si il existe en numériques ). Mais avant ce processus, l’image enregistrée brute en elle-même sera déterminante.
Les images capturées doit être techniquement exploitables. Cela implique que son exposition soit correcte avec une gestion adéquate des sources lumineuses. Une bonne image présente un équilibre entre les parties claires (hautes lumières) et sombres (ombres). Pour éviter de perdre des détails dans les hautes lumières ou les ombres, il est recommandé de viser une exposition qui préserve une large plage dynamique. Mon article sur l’exposition correcte de l’image vous aidera à mieux comprendre. Cliquez ici pour le découvrir.
La balance des blancs est cruciale pour garantir que les couleurs soient fidèles à la réalité. Une mauvaise balance des blancs peut entraîner des dominantes de couleur indésirables, rendant l’étalonnage bien plus difficile.
Une bonne composition aide non seulement à capturer une image esthétique, mais facilite également l’étalonnage. Le choix des couleurs dans la scène, des lumières et des ombres influencera les décisions d’étalonnage.
Le choix du profil d’image : une préparation indispensable
Pour que l’étalonnage atteigne son plein potentiel, il est essentiel de capturer des images avec un profil d’image approprié. Un profil d’image définit la manière dont la caméra capture et enregistre les informations colorimétriques et de luminance. Il en existe plusieurs qui s’imposeront à vous selon la nature de votre projet audiovisuel.
Les différents profils d’image
- Profil standard (Rec.709) :
- Couramment utilisé pour des contenus directement exploitables sans post-production lourde.
- Présente une plage dynamique limitée.
- Avantage : pratique pour les tournages rapides.
- Inconvénient : laisse peu de marge pour l’étalonnage.
- Profil cinématique :
- Fournit des couleurs riches et un contraste préconfiguré.
- Adapté à des projets où le style est pré-défini.
- Profil Log (Logarithmique) :
- Capture une plage dynamique étendue, préservant plus de détails dans les hautes lumières et les ombres. L’image brute semble délavée. En langage audiovisuelle, elle est dite plate (flate)
- Exemples : S-Log (Sony), C-Log (Canon), V-Log (Panasonic).
- Avantage : grande flexibilité pour l’étalonnage.
- Inconvénient : nécessite automatiquement une correction colorimétrique pour être utilisé.
- Profil RAW :
- Enregistre les données brutes du capteur sans compression ni traitement interne.
- Offre un maximum de latitude pour l’étalonnage.
- Idéal pour des projets professionnels exigeants
Comment choisir le bon profil ?
Le choix du profil d’image dépend de plusieurs facteurs. La nature du projet vous guide directement vers quel profil vous tourner Un documentaire n’aura pas les mêmes exigences qu’un court-métrage artistique. Les conditions de tournage peuvent influencer également vos choix. Filmer en basse lumière peut exiger le profil RAW afin de mieux capter les détails.
Si vous ne possédez pas d’équipement pouvant proposer ou supporter le profil Log ou RAW, les choix qui restent vous conduiront vers d’autres profils, plus accessibles. C’est un facteur également à prendre en compte.
Vue le nombre de profils possibles, je vous conseille de tester l’un et l’autre pour vous rendre compte de leurs différences et le degré d’étalonnage possible sur l’image brute.
Pourquoi préférer les profils Log ou RAW ?
Les profils Log et RAW sont les plus recommandés pour l’étalonnage, car ils capturent une quantité d’informations supérieure par rapport aux autres profils. Cela permet de manipuler les images de manière beaucoup plus précise sans compromettre la qualité. L’inconvénient passera par le stockage de vos données quitte même à utiliser des disque durs externes en sortie de caméra et le traitement s’effectuera avec des machines puissantes. Pour que vous compreniez, une seconde de métrage tournée en Raw utilise 4 à 10 fois plus de mémoire qu’une seconde en H264 !

Les étapes clés de l’étalonnage
Vous l’aurez compris que pour bien commencer vous adopterez le bon profil d’image, du moins le plus approprié à vos besoins ou à votre budget. L’étalonnage ne s’opérera qu’à la fin du montage vidéo. Ce serait dommage de passer du temps à étalonner une séquence qui sera ensuite jetée à la poubelle.
La première étape consiste à ajuster les paramètres fondamentaux tels que la balance des blancs, l’exposition, le contraste et les niveaux de saturation pour garantir une base uniforme
Il s’agira ensuite de déterminer le rendu que vous souhaitiez à vos images avec toutes les connotations qu’elles engendrent. Je pense ici au tons dominants : chauds, froids etc… L’intervention de LUTS (Lookup Tables) peut s’appliquer pour créer une ambiance bien précise.
La priorité recherchée est l’harmonisation des plans pour assurer une cohérence sur l’ensemble de la séquence ou du film. Des variations trop marquées entre les plans peuvent distraire le spectateur.
Votre matériel peut influencer le rendu de l’image. Un moniteur calibré garantit que les ajustements effectués se traduisent fidèlement sur tous les écrans. De plus, des surfaces de contrôle spécifiques, comme les panneaux d’étalonnage, facilitent le travail.
Exemple d’images étalonnées à partir de la même prise de vue originale tournée en V-log .



Les outils d’étalonnage
Tous les logiciels de montage offrent des outils qui leur sont propres pour transformer vos images brutes en des images précises de contrastes, de couleurs. Davinci Resolve, Adobe premiere Pro ou encore Final Cut Pro contiennent ses outils avec la possibilité de charger des LUTS.
Logiciels populaires
- DaVinci Resolve :
- Référence en étalonnage, il propose des outils avancés pour la manipulation des couleurs.
- Convient aux professionnels comme aux amateurs.
- Adobe Premiere Pro :
- Intègre des outils de correction colorimétrique efficaces via Lumetri.
- Idéal pour les monteurs qui souhaitent étalonner sans quitter leur logiciel principal.
- Final Cut Pro :
- Offre des fonctionnalités intuitives pour l’étalonnage basique.
Adobe et son outils d’étalonnage
Adobe Premiere Pro est l’un des logiciels de montage les plus utilisés dans l’industrie du cinéma et de la vidéo. Il intègre son outil d’étalonnage appelé couleur lumetri (Lumetri Color) et peut être ouverts directement dans le flux de travail de montage. Cette fonctionnalité permet de nombreuses actions telles que corriger les couleurs, ajuster l’exposition, les contrastes, la saturation et même d’appliquer des LUTs. Il est très intuitive et le résultat se voit directement sur l’image travaillée.
Dans ses options de retouche, vous trouverez l’outil Courbe RGB pour ajuster les tons et les couleurs de manière précise. En jouant sur les canaux Rouge, Vert et Bleu, vous pouvez créer des effets de style ou corriger des couleurs spécifiques. Les roues de couleurs ou chromatiques intégrées à couleur lumetri permettent d’ajuster les teintes de manière intuitive. Cela est particulièrement utile pour corriger les dominantes de couleur et pour faire ressortir certains tons. L’application d’effets comme le vignettage ou le flou est proposé si vous avez besoin de guider l’attention du spectateur et renforcer l’immersion visuelle.
Une des grands forces de Couleur lumetri vient de la possibilité d’appliquer des LUTs créées et partagées par d’autres créateurs. Une fois que vous avez trouvé un look que vous aimez, vous pouvez facilement l’exporter et voir le résultat s’opérer.
DaVinci Resolve et son application puissante
DaVinci Resolve est une référence en matière d’étalonnage professionnel. De nombreux studios de cinéma et de télévision à travers le monde l’utilisent pour ses puissants outils. La page d’étalonnage de DaVinci Resolve est spécialement conçue pour des réglages poussés. Elle propose des outils avancés tels que les courbes, les Nœuds et les effets de couleur. Le système de nœuds de DaVinci Resolve est l’un de ses plus grands atouts. Les nœuds fonctionnent comme les calques sur Photoshop. Chaque nœud peut recevoir différents effets et réglages, ce qui permet de garder une flexibilité incroyable. Vous pouvez facilement ajouter, supprimer ou modifier l’un d’eux sans affecter le reste de votre travail. Vous aurez accès à des outils professionnels pour la correction des couleurs, tels que la balance des blancs fine, les courbes de saturation, et des masques pour isoler des zones spécifiques de l’image.
Resolve propose une bibliothèque de LUTs que vous pouvez utiliser pour donner instantanément un look particulier à votre vidéo. Il est également possible de créer vos propres LUTs pour un usage futur.
L’étalonnage numérique, l’étape à ne plus sous-estimée
L’étalonnage vidéo est un élément essentiel de la production audiovisuelle, transformant des images brutes en des images impctantes. En comprenant les enjeux de l’étalonnage, les caractéristiques à prendre en compte lors de l’enregistrement, ainsi que les outils disponibles sur Adobe Premiere Pro et DaVinci Resolve, tout vidéaste peut améliorer ses productions, qu’il soit amateur ou professionnel.
J’espère que mon article vous aura aidé à comprendre l’étalonnage et à l’aborder avec confiance et créativité. Retenez que la couleur dans votre prochaine œuvre, un court-métrage, un clip musical peut faire toute la différence dans la façon dont l’histoire sera perçue. . Que vous travailliez sur Adobe premirer pro ou DaVinci Resolve, la pratique continue augmentera vos compétences sur l’étalonnage et vous comprendrez avec quel impact la modification de l’un ou l’autre aspect ( exposition, courbe RGB , LUT) affecte votre image. J’espère que je vous ai convaincu de l’importance du travail sur vos prises de vue et que vous embarquerez dans cette aventure et explorerez les possibilités infinies de la colorimétrie pour faire briller votre vision artistique.